Vivre dans une famille qui manque d’argent mais arrive à s’en sortir, ce n’est pas une fatalité. Même si son père meurt lorsqu’on a quatorze ans dans un accident de chantier, écrasé sous une poutre métallique. Oui, c’est triste, mais on a pas le temps de s’arrêter, parce que maman s’effondre et qu’on a une petite sœur à s’occuper. Malheureusement, on se retrouve à finir son adolescence à mentir sur son âge pour trouver des petits boulots en parallèle du lycée pour aider à la maison, et on réussit de justesse son bac. Mais ça ne suffit pas. Parce que maman fait plusieurs tentatives de suicides et qu’on doit tout cacher à la plus jeune pour la préserver. Et qu’on doit payer pour l’internement de maman. Et ça coute cher. Très cher. Trop cher.
Ça faisait déjà quelque temps que ça tournait dans la tête, mais on finit par renoncer à trouver des travails autres. Et on se prostitue. L’escorting paye bien, et sa première nuit lui a permis de régler une partie de la dette de sa mère non négligeable. La virginité coute cher. Elle l’a appris ce jour-là.

Après son bac, elle a eu une longue période où elle enchainait son travail de nuit et un petit boulot de jour pour garder la face devant sa sœur, jusqu’à ce que celle-ci soit aussi diplômée et puisse se débrouiller à peu près seule. Et heureusement, parce que leur mère a rajouté à sa dépression un cancer qui a poussé la facture vers des sommets qui ont failli faire s’effondrer Soweon. Alors plutôt que de faire ce qu’elle avait prévu : laisser tomber l’escorting et reprendre ses études. Elle a décidé de continuer, de faire les deux. Et non, sa vie ne s’améliore pas. Parfois, quand elle est allongée sur un lit, et qu’elle attend que ça passe, elle espère que sa mère meurt vite de son cancer, et elle se déteste pour ça.